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Dossier : Du blasphème dans l’art contemporain

Arts Sacrés n°18, juillet-août 2012

Collectif. Articles de François Boespflug, Jérôme Cottin, Dominique Ponnau, Olivier Py, Isabelle Saint-Martin

En principe, nous ne recensons pas les revues (mais seulement les ouvrages){}.
Nous faisons ici une exception, pour deux raisons :

 d’une part pour présenter cette revue, Arts Sacrés, née en octobre 2009, qui en est à son dix-huitième numéro, et dont le rédacteur en chef, Philippe Markiewicz, est un moine bénédictin passionné d’art (contemporain). C’est la revue que tout le monde attendait sur les sujets qui nous intéressent. Elle combine à la fois une iconographie abondante et remarquable, sur papier glacé, des articles de haut niveau - mais néanmoins accessibles au grand public - écrits par des spécialistes, et une double approche de l’art dans ses relations à la spiritualité (qui ne se limite pas à la spiritualité chrétienne, même si elle est prépondérante) : - l’art dans son côté patrimonial, les œuvres du passé ; - mais aussi l’art contemporain, et même l’art des toutes dernières années (appelé "l’art d’aujourd’hui" ou "l’art actuel").

 d’autre part parce que le dossier de ce numéro (chaque numéro comporte un dossier thématique, et différentes autres rubriques) est à la fois original, courageux et nécessaire. Peu d’ouvrages ont en effet traité de la question du blasphème dans l’art. C’est pourtant une question très actuelle, vu le nombre d’œuvres récentes dénoncées comme blasphématoires (le Piss Christ de Serrano, La pièce de théâtre de Castellucci, Golgotha Picnic, autre représentation théâtrale, ainsi que d’autres œuvres moins connues et moins médiatisées).

Les contributeurs - pourtant très différents - vont tous dans le même sens : la notion de blasphème est éminemment problématique, et elle traduit en général à la fois une méconnaissance des ressorts de la création contemporaine et un refus de l’autre dans sa différence. Ce qui a été dénoncé comme blasphème dans l’histoire apparaît en général, avec le temps, comme un authentique chef d’œuvre, universellement reconnu. C’est le cas des œuvres d’art des expressionnistes allemands, dénoncées par les nazis (et la société allemande dans son ensemble) comme "art dégénéré, et reconnues aujourd’hui comme faisant parti des plus grandes œuvres du 20e siècle.

Si l’on prend la peine de remonter aux textes bibliques, on s’aperçoit que Jésus lui-même était dénoncé comme blasphémateur. Par un subtile retournement, le blasphémateur apparait comme celui est porteur d’une authentique parole, tandis que celui qui accuse de blasphème, c’est en fait lui qui blasphème. Il est l’arroseur arrosé.

Même si toutes les œuvres dénoncées comme blasphématrices n’ont pas pu être reproduites, on en voit ici un certain nombre (en particulier le Piss Christ de Serrano, vandalisé à Avignon le 18 avril 2011), bien mises en valeur par une iconographie soignée (et soigneusement légendée).

Jérôme COTTIN